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25 juillet 2006 2 25 /07 /juillet /2006 14:45

Bon, ben comme d'habitude personne n'a pris de position claire sur le simple vote que je vous demandais. Ah la la, les français sont des veaux, tout ça, tout ça. Du coup va falloir que je me tape les deux histoires... mais bon, hors de question que ça se fasse à la suite ! Je trouverai bien des conneries comme sujets entre les articles, na.

Aujourd'hui, on va donc vous parler d'une expérience fort traumatisante qui m'est arrivée en Allemagne. Replantons le décor. Je dois avoir 17 ans, je suis toujours plutôt catastrophique, et j'effectue un stage dans une banque allemande que nous ne nommerons pas pendant l'été. Glamour, eh ?

Tout cela ne serait rien si je n'avais pas non plus une grand-mère allemande, veuve, et très possessive envers son petit-fils (moi). Du coup, une fois par semaine, le week-end, je me tapais la corvée de remonter sur Bonn pour lui bisouiller la joue et manger avec elle en échangeant des conversations passionnantes sur la cuisson de la viande et le temps qui est chargé d'orage, eh oui ma bonne dame.

Ce dimanche-là, plongé dans mon assiette, j'étais loin de me douter que le destin farceur allait pimenter d'un doigt féminin ce séjour qui promettait déjà d'être absolument mortel. J'écoutais d'une oreille les plaintes grand-maternelles sur la circulation dans sa rue tout en me demandant si je pouvais éventuellement écourter mon stage et rentrer plus vite en France. Quand soudain...

Soudain, on sonne à la porte. C'est rare, chez ma grand-mère. Elle a 94 ans donc niveau amis qui viennent avec la vodka sous le bras sans se faire annoncer, ya pas trop. Elle hausse un sourcil. Je hausse un soucil. Nous haussons les sourcils de concert. Et ça resonne. "Mon dieu, sûrement un cambrioleur" dit-elle.

Comme tout petit-fils qui se respecte, je bande fermement (mes muscles) et je tire fermement (la porte).

Dehors, une vision de rêve pour l'ado que j'étais. Une demi-douzaine de filles en minishorts et petits tops pour supporter la chaleur, qui s'éventent avec componction avec les feuilles d'un questionnaire. Bon, je n'ai jamais été fan des allemandes en général, mais là pardon, c'était de la qualité supérieure, du Claudia Schifferage prometteur. Et puis bon, 17 ans, les hormones titillent.

"Bonjour" qu'elles font (oui, je vais vous traduire les conversations, ce sera plus pratique
"Guuueuuh" que je réponds (dans toutes les langues, ça donne la même chose)
"Nous sommes des militantes pour le WWF, nous venons pour un sondage, vous avez deux minutes ?"
"Bleeergh" que j'opine en admirant le superbe panda sur le top de la fille leader.
"Oh mais vous êtes français, trop cool, vive la France" !
"Glaaaaaaack" admets-je avec l'accent.

On me noie sous dix mille questions, on me demande si je suis gentil (oui), si je suis pour la paix dans le monde (oui), pour la déforestation (non), pour la mort injuste des bébés phoques (non), pour le tri et le recyclage (oui), pour les organisations comme Greenpeace (oui), si je veux souscrire et donner plein de sous (euh...).

C'est à ce moment que ma grand-mère intervient comme une furie et vient s'encadrer dans l'embrasure de la porte, le balai au côté, la bave aux lèvres.

"Fuyez, catins de satin ! Partez d'ici avant que je vous tranche en morceaux ! Succubes ! Séduisantes impénitentes ! Jezabel Fardées ! Allez trimballer vos jambes bronzées ailleurs que devant mon petit-fils qui du coup ne m'écoute plus parler de la cuisson du riz de veau !"

Bon, j'exagère un peu mais l'idée est là. Elle les a envoyées bouler comme une furie, a gueulé qu'elle ne me voyait pas beaucoup dans la semaine donc qu'il était hors de question qu'un quelconque questionnaire nous fasse perdre du temps ensemble et surtout, surtout, que jamais elle ne lâcherait un sou pour leur organisation donc bon vent.

Oui, ma grand-mère a un don naturel pour se faire des amies parmi la jeunesse en minishort.

En-dehors de l'aspect esthétique, j'aurais pu oublier rapidement cette histoire et revenir au train-train quotidien du travail bancaire (ne vous imaginez rien de formidable, j'étais au guichet). Sauf que...

Une semaine plus tard, coup de fil de mes parents: "Ca va, tu t'amuses bien en Allemagne ?"
Moi: "Ben bof justement"
Eux: "Et ta copine ?"
Moi: "Qui ? Ma quoi ?"
Eux: "Ne nous mens pas, on vient de recevoir une lettre pour toi d'Allemagne, avec une écriture féminine, et parfumée à la lavande que c'en est écoeurant"

Grand blanc.

Evidemment, j'avais complètement oublié l'épisode WWF. Du coup, j'essaie frénétiquement de me souvenir si j'ai pu rencontrer quelqu'un de vaguement féminin au guichet et si, surtout, j'ai laissé mon adresse. Mais non, aucun souvenir, impossible. Du coup je leur demande de me la réexpédier en Allemagne et j'attends avec curiosité.

Quand je reçois enfin la lettre (dont l'odeur de lavande n'était toujours pas estompée), je déchire l'enveloppe et je lis:

"Bonjour,

On s'est vus chez ta grand-mère mais on n'a pas pu suffisamment discuter vu comme elle a pété les plombs. C'est dommage, ça aurait pu être sympa ! Enfin fais-moi signe quand tu repasses en Allemagne, on pourrait se prendre un verre et apprendre à se connaître

PS: J'ai eu ton adresse sur le questionnaire WWF, j'étais la fille avec les longs cheveux blonds."

Ok, tout s'explique. Je me tape un gros flashback sur le moment du questionnaire. Bon, j'avais bien fait attention au degré de cuisson des jambes devant moi, mais les cheveux... merde, c'est laquelle ? En même temps, longs cheveux blonds, c'est prometteur.

Du coup, décidé à pimenter un peu la vie allemande, je prends ma meilleure plume et je réponds un truc du genre:

"Hello,

Quelle chance, je suis toujours dans le coin. Si tu veux qu'on prenne un verre demain, ça ne pose pas de souci, je fais le trajet. Voilà mon numéro allemand, blablabla"

Je dépose directement le truc dans sa boîte aux lettres, rapidement j'ai un coup de fil, joie et bonheur. Elle me dit qu'elle joue du violon justement demain, que ça lui ferait super plaisir que je la regarde jouer, et qu'ensuite sa mère nous déposera dans un coin sympa pour la soirée.

Bon, ça paraissait sympa tout ça. Mais j'aurais dû me méfier.

Déjà, rejoindre la salle de concerts a été une galère totale. A cet âge, sans voiture ni permis, on compte sur les transports en commun. Or, évidemment, ce n'est pas une salle en plein coeur de Bonn mais à la périphérie, sur des petites routes couvertes par des bus qui circulent peu le soir, bref je change trois fois de correspondance, je me paume, je demande mon chemin, je pleure, je râle, et j'arrive alors que le concert est bien avancé.

Je me glisse dans la foule en essayant de faire le moins de bruit possible et, une fois assis, je tente de trouver ma superbe Claudia Schiffer. Bon, comme tous les gens de l'orchestre sont en pantalon et n'ont pas de minishort, ça complique le travail de reconnaissance. Je cherche, je cherche, sans trouver.

Et soudain, le voile se déchire. Profitant d'une pause dans son morceau et sans la moindre retenue compte tenu du fait qu'elle est sur scène, je vois une petite boule de graisse qui sautille dans tous les sens en agitant les bras. S'il n'y avait pas eu de musique autour d'elle, elle aurait sûrement gueulé "ouhou, ouhouuuu !"

Bon, rien à dire, il y avait les cheveux blonds. Ils étaient même longs, comme promis. Mais alors pour le reste.... merde, mais comment avais-je fait pour ne pas me rappeler qu'elle était présente aussi ? C'est impressionnant, les mécanismes d'occultation du cerveau humain.

Oui, je sais, vous allez dire que je ne suis pas gentil, que le physique ne fait pas tout (surtout vu la gueule que j'avais), que la beauté intérieure.... mais bon, non quoi, non ! Je m'imaginais déjà dans un épisode de roman d'amour, la lèvre frémissant des compliments français que j'allais répandre sur la belle et paf, je me retrouve dans Benny Hill.

Le concert à peine terminé (oui, j'ai de bonnes manières, je suis resté), elle fonce sur moi comme la vérole sur le bas-clergé. Vous avez déjà essayé d'arrêter un train de marchandises ? Ben pareil.

"Regardez, regardez, c'est mon copain et il est français !" qu'elle brame à toutes ses copines violonistes qui visiblement n'en ont absolument rien à battre. Moi, j'hésite à commenter la méprise.

Je n'ai pas l'occasion d'ouvrir la bouche de toute façon puisque la mère arrive sur ces entrefaites, les yeux tout humides de voir sa fille en train de jouer les tourterelles. Gloups.

"Bon, les jeunes, je vous emmène en ville, vous me dites où vous voulez que je vous dépose ! Mais ne rentrez pas trop trop tard, hein ?"

"Mamaaaaaan" brame la fille.

Regloups.

Résumons la situation. Je me retrouve à l'arrière d'une voiture avec une fille qui ne me plaît absolument pas mais qui se colle à moi comme une ventouse en prenant mon consentement comme acquis, sous le regard bienveillant de la mater familias qui joue les mater maquerellas. J'ai soudain besoin d'un peu d'air.

Rapide regard vers la dulcinée en puissance. Non, mais non quoi. En plus elle s'est maquillée à la truelle, avec du rouge à lèvres qui lui dégouline partout sur le triple menton. Quoi, je suis méchant ? Hey, ce n'était pas vous qui étiez là à esquiver sa bouche en souriant stupidement.

Finalement, je fuirai lâchement.
"Non mais là j'ai grave mal au crâne, laissez-moi en ville, je retrouverai mon chemin, pas grave, on remet la soirée à une prochaine fois" je murmure.

Regard assassin de fifille. Regard meurtrier de maman, style "si tu fais pleurer ma fille, je vais te montrer à quoi sert réellement un four crématoire" (rhoooo). Plus personne ne desserre les dents. Je me fais éjecter à la Bertna von Südner Platz pour ceux qui connaissent, la fille descend aussi, elle essaie un baiser langoureux, je me prends du rouge à lèvres partout avant de détaler sans demander mon reste.

Et je cours, je cours dans les rues de Bonn, dégoûté, désespéré, tous mes rêves brisés, mon histoire d'amour anéantie avant même d'avoir commencé. Ouais, je suis difficile, je sais, mais merde quoi.

La vie est dégueulasse. A bas le WWF. 

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commentaires

S
Ben, je dois te dire un tout grand merci pour ton histoire de WWF. Tu as égayé toute mon après-midi. C'est peu mais c'est pas mal. peut-être que tu devrais écrire des sketches ? Encore merci pour ce déridage !
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Z
Je vais poser mes questions ici^^<br /> D'où te vient cette passion pour l'écriture?<br /> Dans quel but écris-tu?<br /> Est-ce pour toi ton métier à part entière ou est-ce que cela reste une passion externe à toute profession?<br /> Qu'est-ce qui t'inspire le plus?<br /> N'as-tu jamais eu de doutes, ou été confronté aux fameuses angoisses de la page blanche? C'est vrai, tu écris tellement, et à des intervalles si réduits, que je me demande comment tu peux puiser autant d'inspiration riche et variée, sans te retrouver dans des impasses parfois!^^<br /> Je sais que ça fait beaucoup de questions mais disons que peu de personnes de mon entourage s'intéressent à l'écriture, et j'aimerais partager un autre avis que le miens sur ce sujet...<br /> Voilà, bizoox à toi!
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S
C'est moi ou la lettre d'amour est absente ? (tu sais avec les mots doux toussa toussa...)
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T
  Je crois que l'idée que beaucoup de gens se font des allemandes est directement la faute des medias gaulois.<br />   Tous les ans je cherche à me rendre plus à l'est de notre Europe afin d'y decouvrir des merveilles historiques ou humaines. <br />   Je passe donc bien souvent par l'Allemagne que j'affectionne particulierement et franchement, les allemandes sont pour beaucoup tres tres mignones (Bien que mon coup de coeur soit pour les polonaises)<br />   Je parle peu mais je suis toujours tes articles avec joie et attends la suite avec impatience...
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B
Pour avoir passé plusieurs stages en Allemagne, je n'ai jamais été fan des allemandes. Mais c'est clairement une question de timing, d'endroit...<br /> En l'occurence, toutes celles que j'ai rencontrées avaient les cheveux courts ou des piercings dans des endroits improbables...
M
Bon, ben j'ai jamais donné dans la teutonne... euh... Syrène parle allemand, ça compte ? <br /> Mdr... <br /> Par contre, j'ai aussi milité pour le WWF quand j'étais plus jeune... Mais jamais été entouré de charmante demoiselle ainsi... En tout cas, ce fut très drôle à te lire...
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B
Mais dis-moi, elle a plein de qualités Syrène ;)<br /> Ouais, le WWF, ce n'est plus ce que c'était.

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