Tant qu'à avoir le vague à l'âme, autant se plonger dans cette fameuse période bénie dont je parlais, cette adolescence dont je n'ai finalement pas trop profité - sexuellement parlant - mais qui reste tout de même parée de moments magiques.
Ca va vous paraître ridicule, vous allez voir. Déjà à l'époque, j'avais le don de me mettre dans des positions pas croyables. La différence, c'est que je n'avais pas de recul et que ça m'embarassait bien plus qu'aujourd'hui.
Putain, c'est vieux tout ça. Mais les souvenirs restent. Voilà quelques morceaux de bravoure.
1. La main
Je me souviens particulièrement d'une journée en 2nde où j'étais assis pour une fois à côté d'une très jolie fille. Evidemment, comme tous les garçons timides de mon âge, je n'avais jamais montré le moindre intérêt direct et ne lui avais probablement jamais adressé la parole. De toute façon, ça aurait été une catastrophe vu la dégaine de l'époque. Quoi qu'il en soit, pendant la pause je discutais avec un ami du rang derrière, et ma main traînait négligemment sur le siège vide.
La cloche sonne, la fille revient - et s'asseoit sur ma main.
Ouais, je vous disais que ça n'arrivait qu'à moi. Et évidemment, j'ai eu un cas de conscience épouvantable, tout en rougissant jusqu'à la racine des cheveux. Je fais quoi, là ? Je retire ma main tout de suite ? Oui mais ça veut dire que je vais lui masser le cul en passant, c'est moyen... ou alors je la laisse ? Ou j'essaie de l'enlever discrètement ? Mais c'est pas trop possible... et d'ailleurs comme la princesse au petit pois, elle s'est certainement rendu compte d'une intrusion sous ses fesses. Alors pourquoi elle ne réagit pas, putain ? Pourquoi est-ce qu'elle ne se relève pas ? Pourquoi est-ce qu'elle ne me parle pas ? Pourquoi elle ne me demande pas de l'enlever ? Pourquoi elle ne m'engueule pas ?
Vous n'imaginez pas toutes les pensées qui peuvent tourbillonner en un quart de seconde dans l'esprit d'un ado coincé (ou alors si, vous l'imaginez très bien ^^). Sans compter le sourire égrillard du pote avec qui je parlais qui s'est rendu compte de mon embarras.
Bon, finalement et après un temps assez long (plus d'une minute, sérieux, c'est loooooong), je finis par retirer brutalement ma main. Tant pis, c'est comme un sparadrap, faut enlever d'un seul coup. La fille se retourne vers moi, elle se marre franchement. Moi, je suis rouge comme une pivoine. Je crois que même la racine de mes cheveux doit être d'une splendide couleur carmin. Je baisse le nez dans mes cours, j'en peux plus.
2. Les genoux
Un voyage au ski, toujours en seconde. De nouveau, une très jolie fille à côté de moi, le genre qu'à l'époque je n'envisageais même pas de dévisager. Vous voyez le genre dont je veux parler, celle dont tous les garçons sont secrètement amoureux, et qui en plus est gentille et modeste, bref celle qui vous fait croire que la fille parfaite existe.
Je suis donc à côté d'elle, ne me demandez pas pourquoi ni comment. Subtile technique mise en oeuvre de ma part ou hasard total ? Je ne m'en souviens pas. Ce dont je me souviens, par contre, c'est qu'elle attire évidemment toute une cour de filles et d'amies autour d'elles. Et donc mon siège se retrouve entouré par une horde piailleuse qui se raconte les derniers potins. Je suis le seul mec dans le coin, je fais tous les efforts du monde pour me fondre dans le paysage et le fauteuil du car. Je suis beige, beige comme le revêtement en tissu, je ne suis pas là, oubliez-moi.
Bah ça a mieux marché que je pensais, en fait. Parce que la fille se tourne vers moi et me demande avec une innocence qui me sidère encore maintenant: "Ca te dérange si je me mets sur tes genoux ? Comme ça mes copines peuvent s'asseoir à ma place en se serrant"
Moi: "euh... bah... geuh... rheeeuh... ben... je...."
Et j'ai donc passé plus de deux heures de car avec cette Miss Lycée sur les genoux. J'étais complètement paniqué, je ne comprenais pas ce qu'il m'arrivait. Et accessoirement, j'essayais en serrant les jambes de dissimuler une réaction physiologique fort ennuyeuse - avec peu de succès. Elle a forcément senti quelque chose buter contre ses fesses pendant la moitié du voyage, mais elle n'a pas bronché.
Le car arrive, et la journée de ski se passe sans que je la recroise. Le soir, on reprend le car. Elle est de nouveau à côté de moi (cette fois j'avais tout fait pour, hein). De nouveau, le troupeau de filles s'agglutine autour d'elle. Sauf que là, rien. Rien de rien. J'avais beau essayer de lancer des allusions de la subtilité d'un gnou au pâturage ("Ca va, t'as assez de place ? Tes copines veulent pas s'asseoir ? NOn parce que deux heures c'est long..."), que dalle.
Putain, qu'est-ce qui lui avait pris de s'asseoir sur mes genoux ? Elle ne pouvait pas se rendre compte de l'effet que ça pouvait provoquer sur un boulet comme moi ?
3. La technique foireuse
Un ami qui jouait le rôle de coach à l'époque avec un manque de talent assez flagrant m'avait asséné une vérité fondamentale sur les filles: il fallait les traiter avec froideur pour qu'elles s'intéressent à nous. Mieux, leur donner une raison de nous détester pour ensuite les consoler lui paraissait le comble de la subtilité.
Bon. Je tiens à dire que je n'étais quand même pas lobotomisé à l'époque, mais il n'empêche que son idée a fini par faire son chemin. J'étais en seconde, là encore. Oh my god, classe charnière. Entre midi et deux, il nous arrivait de jouer au tarot avec des amis. Et soudain, miracle, magie, enchantement, la fille de la main (faut suivre) rentre dans la pièce. Elle commence à demander si elle peut jouer avec nous.
Les autres joueurs acquiescent évidemment. Mais moi, je suis remonté à bloc. Je suis décidé à utiliser cette technique. Et je prends donc une grande inspiration avant de dire: "Non, le tarot ça se joue à 5 et on est 5, t'es bigleuse ou quoi ? De toute façon hors de question qu'on joue avec toi".
Ouais, je sais, j'ai un don.
Les yeux de la fille s'agrandissent (d'autant plus qu'elle me connaît et que je suis doux comme un agneau), elle se barre en claquant la porte. Victoire ! Il ne me reste plus qu'à lui courir après, à m'excuser platement et à la prendre dans les bras pour la consoler (c'était les conseils du coach).
Je pose donc mon jeu sous les regards outrés des amis et je cours après la fille. Evidemment, tout foire. Je me plante de chemin et je ne la trouve que dix minutes après. Elle est avec ses copines, impossible de lui parler et de s'incruster. Toutes les phrases que j'avais préparé se figent. Et là elle me voit et me lance un regard... putain, si les regards pouvaient tuer, je n'aurais pas de blog à l'heure qu'il est.
Et je reste seul, le nez dans ma merde, à les regarder partir.
Well done, le coach. Well done.
C'est marrant tous ces souvenirs. Je ne m'en rappelais pas, et ça revient par vagues. Comme dirait une amie, j'étais vraiment un taille de boulet.